Le bébé le plus âgé du monde !
© Maroun BADR (PhD)
Docteur en bioéthique
Research Scholar at UNESCO Chair in Bioethics and Human Rights – Rome
Associate Researcher at Facultad de Bioética Universidad Anáhuac México
30/08/2025
Le « bébé le plus âgé du monde » est né d’un embryon congelé il y a 30 ans !
Cette nouvelle ne peut pas passer sous silence parce que la pratique de la cryoconservation soulève des sérieuses questions bioéthiques qui doivent être scrutées en profondeur. En voici quelques-unes.
1. Une rupture spatio-temporelle dans le statut de l’embryon
- Rupture spatiale, parce la parentalité à son égard est figée dans un choix décisif de ceux qui l’ont « désiré », non pas pour lui-même mais pour assouvir à leur propre désir.
- Rupture temporelle, parce qu’il se trouve dans une zone intermédiaire où ni la vie ni la mort n’existent.
Cette double rupture et l’éventuel non-désir de le garder menacent l’embryon dans son existence quand il est voué à être utilisé pour la recherche; il est menacé par le meurtre, par l’infanticide, voire par l’assassinat (M. Badr, Fiction desincarnée, paternicide et materficielle, 2022).
2. Une rupture chronologique dans la fratrie
L’enfant né faisait partie de 4 embryons congelés créés en 1990 à partir d’une fécondation in vitro (FIV) dont une fille est déjà née en 1994. Il s’agit d’une « rupture volontaire d’égalité entre les enfants […], laquelle n’est pas sans risques pour le développement psychologique et l’épanouissement de l’enfant » (J.-F. Mattei et al., Rapport sur le Projet de loi relatif à la bioéthique, 2019).
3. Un pouvoir inégalitaire
Figer un embryon sous congélation est une forme de pouvoir qu’excerce un être humain sur un autre. « L’être prénatal n’est plus l’auteur de sa biographie personnelle en tant que membre d’une lignée généalogique. La réification de l’enfant à naître exerce un pouvoir inégalitaire des ascendants sur les descendants en supprimant l’égale dignité dans la naissance entre les deux parties » (M. Badr, Fiction desincarnée, paternicide et materficielle, 2022).
4. Les conséquences sanitaires
Plusieurs études ont montré que les enfants nés suite à une congélation ont un risque accru de cancer/leucémie (P. Rios et al., Medically Assisted Reproduction and Risk of Cancer Among Offspring, 2024), malformation cardiaque (N. Sargisian et al., Congenital heart defects in children born after assisted reproductive technology, 2024), risques épigénétiques (J. Barberet, Do frozen embryo transfers modify the epigenetic control…, 2021; R. Sciorio et al., Epigenetic Risks of Medically Assisted Reproduction, 2024). Mais aussi, il y a un risque accru de troubles de l’humeur et de consommation d’antidépresseurs (C. Wang et al., Long-term Follow-up of Psychiatric Disorders in Children and…, 2021). Certainement, tout n’est pas encore exploré.
Et après…?