Recension
Où es-tu maman?
Le témoignage poignant d’une femme née par GPA
© Maroun BADR (PhD)
Docteur en bioéthique
23/02/2025
Bien qu’elle soit interdite en France jusqu’à présent, la GPA (Gestation pour autrui) n’a jamais quitté la scène comme sujet de débat. Cette pratique qui consiste à recourir à une mère porteuse pour avoir un enfant soulève des enjeux et des défis bioéthiques camouflés sous le signe du don et de l’amour. C’est la raison pour laquelle, le 23 avril 2024, le Parlement européen a voté un amendement modifiant la Directive sur la traite des êtres humains en y incluant la GPA qualifiée par le terme « exploitation » (le Parlement utilise l’expression : « maternité de substitution ») .
Dans Où es-tu maman ? Le témoignage poignant d’une femme née par GPA (éditions du Rocher, 19 février 2025), Olivia Maurel – 33 ans, franco-américaine, mariée, mère de trois enfants et porte-parole de la Déclaration de Casablanca – livre son témoignage et sa détermination pour consacrer sa « vie à la lutte pour l’abolition universelle de cette pratique [la GPA] » (p. 146).
L’ouvrage est conçu en deux parties. La première partie est une autobiographie dans laquelle l’autrice s’exprime sans ménagement. Avec un courage indéfectible et une franchise surprenante, Olivia Maurel raconte son parcours traversé par une crise existentielle du « syndrome abandonnique » (p. 53) : son « être tout entier hurle pour un retour aux sources » (p. 43). Elle n’a pas hésité d’exposer ses douloureuses expériences, parfois difficiles à lire en raison de certaines atrocités, montrant à quel point le fait d’être arraché(e) à la naissance de la mère biologique et d’être privé(e) du « peau à peau » (p. 104) sont des actes traumatisants qui marquent profondément et à jamais la personne humaine.
Existe-t-il une GPA « éthique » ou « altruiste » ? C’est sur cette question sensible que se positionne Olivia Maurel. Pour se faire, elle procède, dans la seconde partie, à déconstruire les mythes héroïques entourant la GPA. L’autrice dévoile le business caché par les cliniques engagées dans cette pratique ainsi que le marketing forcé et subversif par les médias et les réseaux sociaux, comme l’instrumentalisation des enfants (6-14 ans) nés d’une GPA (p. 163) et le « black Friday GPA » (p. 170). Elle dénonce la réification de l’enfant laquelle transforme ce dernier en un objet de désir et de droit, le « bricolage » de la filiation (p. 200) ainsi que l’exploitation des femmes/mères porteuses (p. 281) et leur recrutement par la tromperie (p. 242).
Au total, avec ce témoignage glaçant et en brisant le silence, Olivia Maurel devient une figure internationale et la « voix de ce qui n’ont pas de voix » pour affirmer avec un ton ferme que « la GPA est sombre par nature pour la femme et pour l’enfant » (p. 140).